Deux films presque homonymes à propos des troubles du comportement alimentaires

En souhaitant visionner en replay le film au sujet des troubles du comportement alimentaire diffusé à la télévision lors de la journée mondiale des TCA le 2 juin 2021, je me suis rendue compte qu’il existait deux films à titre quasi identiques à un mot près !

Ces films ont été réalisés à plus de trois décennies d’écart, mais sont tous les deux assez éclairants sur les TCA. On peut voir aussi l’évolution des connaissances au sujet des TCA en visionnant ces deux films.

J’ai décidé de vous en parler dans cet article.

Le film franco québécois « La peau et les os »

Ce premier film, quasi homonyme du second (décrit en deuxième partie) à un mot près, date de 1988.

Il s’agit d’une docufiction sur le monde de l’anorexie et de la boulimie.
Les héroïnes de ce film bouleversant s’appellent Annie, Andréanne, Hélène, Eisha. Elles ont en commun leur jeunesse et leur charme… ainsi qu’une terrible tendance à l’autodestruction. Pourquoi?

Annie, jeune adolescente, souffre d’anorexie mentale et doit être hospitalisée compte tenu de ses paramètres vitaux. On peut voir la bienveillance et les explications du médecin qui l’examine. Au cours de son hospitalisation, on peut aussi constater l’importance de la psychoéducation ainsi que la prise en charge de la diététicienne au cours du repas et lors du choix des aliments. Annie mentionne qu’elle ne trouve pas de facteurs familiaux qui l’ont mise en difficulté. Dans ses souvenirs, elle ne trouve qu’une réflexion de sa tante (qu’elle a interprétée comme si elle n’était pas belle avec quelques kilos de plus), rien d’autre.

A l’hôpital Douglas au Québec, dans l’unité d’hospitalisation des personnes souffrant d’anorexie et/ou de boulimie, plusieurs jeunes femmes témoignent.

Andréanne, jeune femme de 19 ans, souffre d’anorexie mentale accompagnée d’hyperactivité physique. Les rapports familiaux sont tendus, plus particulièrement avec son père, dont elle voudrait avoir l’affection comme quand elle était petite fille. Elle réclame amour et attention, alors que son père répond plutôt par la froideur, et lui demande de devenir adulte, de se prendre en charge, de trouver un emploi. Le père est très souvent au travail, et ainsi très souvent absent de la maison. Un soir, il essaie de raisonner sa fille, lui dit certaines choses, tente un geste affectueux, qu’Andréanne espère et que pourtant elle refuse. Andréanne est en proie à ses ruminations et des pensées d’auto dévaluation intenses. On constate, dans la scène où Andréanne regarde un magazine, le rôle néfaste des magazines féminins, source d’insatisfaction corporelle intense.

Hélène, souffrant de boulimie en alternance avec des épisodes d’anorexie, explique bien la perte de contrôle vécue lors des crises de boulimie. Elle analyse la difficulté d’accès à ses émotions. Elle évoque la complexité des relations familiales, l’emprise de sa mère dans la cellule familiale puis son décès alors qu’elle n’est qu’une enfant. Les relations avec son père et son frère se réorganisent. Elle a besoin de leur affection et de leur reconnaissance.

Eisha, a souffert d’anorexie et témoigne qu’elle était toujours tendue à l’école. Elle avait froid en permanence. Elle explique la complexité de sa relation avec la nourriture. En voyant les autres guérir, elle a repris confiance en elle et en ses capacités. Elle est déterminée à ne plus laisser de place à l’anorexie dont elle a souffert 4 ans, 4 années de trop, dit-elle. Lorsqu’elle était malade, elle aimait passer inapperçue, que personne ne la voit, ne voulait pas être une femme. Elle s’est beaucoup interrogée sur sa raison d’être sur Terre, le but de la vie.

Dans ce film, on découvre aussi Jeanne (souffrant d’anorexie), qui se dévoue à Dieu et rentre dans un couvent au Canada, loin de chez elle. Cette jeune femme s’est enfuie de chez elle pour échapper à un mariage forcé. En s’enfuyant aussi loin, elle espère que père et frère(s) ne pourront l’atteindre. Elle cite en écrivant à sa mère :

« Ici, je tenterai d’accomplir ce qui est commun à toutes avec plus de perfection, me mortifiant au service de mon divin époux crucifié, je ne vous (sa mère) appartiens plus désormais… J’appartiens totalement à mon Dieu ». On retrouve chez Jeanne donc les notions de sortie d’adolescence impossible, de dévotion et religion poussées à l’extrême, à la négation de soi et des besoins de la chair, jusqu’à l’inanition. Et malheureusement jusqu’à la mort, épilogue de ce film documentant bien la difficulté d’appréhension des TCA.

Passons à présent au deuxième film presque homonyme, plus récent, qui approche les TCA essentiellement en suivant l’évolution d’une adolescente souffrant d’anorexie.

Le film Allemand  » la peau sur les os »

film la peau sur les os

Ce film, presque homonyme du premier (« sur » au lieu de « et »), de Christina Schiewe, réalisé avec le scénariste allemand Burkhardt Wunderlich, est sorti en 2019.

Voici une vidéo proposée par Actu Star qui évoque la projection du film sur M6 le 2 juin2021 et résume plus globalement les TCA.

Résumé du film « la peau sur les os » et analyse des facteurs

Ce film aborde plus spécifiquement l’anorexie mentale à travers le personnage principal de Lara. Toutefois lorsque cette dernière fréquente le groupe de paroles, on peut voir d’autres jeunes filles atteintes de boulimie et d’hyperphagie.

Lara, adolescente, cache son corps sous de nombreuses couches de vêtements. Elle pratique la course à pied de manière intensive. Après avoir trouvé de la nourriture périmée dans sa chambre et découvert la maigreur de sa fille ainsi que ses stratagèmes pour cacher son poids, sa mère Susanne va voir ses craintes confirmées : Lara souffre d’anorexie… Un combat acharné commence car Lara n’admet pas la maladie.

Dans le trouble de Lara, le facteur dit « facilitateur « est l’adolescence.

Le facteur déclencheur est le déménagement de ses parents suivi d’une perte de repères et d’un mal être.

Mes commentaires et impressions sur ce film « la peau sur les os »

J’ai apprécié qu’enfin, un réalisateur ne positionne pas les parents comme instigateurs du mal être et de la maladie de leur enfant.

Au contraire, la famille de Lara n’est pas dysfonctionnelle, et aucun des membres de la famille ne souffre de trouble du comportement alimentaire.

En effet, dans au moins la moitié des cas de TCA (anorexie incluse), la famille n’est pas en cause directement du fait d’un dysfonctionnement net ou majeur (source Association Autrement).

Il est important de savoir que la génétique rend compte d’environ 35 % des cas d’anorexie mentale (source Association Autrement). Malgré cela, il n’y a pas de plus de difficultés de traitement et cela n’affecte pas le pronostic.

De plus, l’approche de la réalisatrice conforte les dernières données thérapeutiques à savoir que la famille peut avoir le rôle de co-thérapeute.

L’aide des parents, est plus qu’utile, elle est indispensable. Les parents, en restant bienveillants et attentifs, se doivent de diriger le plus rapidement possible leur enfant/leur adolescent vers des soins auprès de professionnels de santé formés en TCA.

Dans ce film, le père implore un psychothérapeute d’accepter Lara dans son groupe de parole.

On peut constater l’intuition et la finesse d’analyse de la mère, qui repère précocement les signes de la maladie et surveille étroitement Lara afin d’entraver tous les stratagèmes mis en place par Lara pour cacher son trouble.

Sa mère va jusqu’à démissionner de son travail afin d’être présente à plein temps pour sauver Lara des griffes de l’anorexie. Elle souhaite faire admettre sa fille à l’hôpital pour se soigner mais finalement une prise en charge ambulatoire sera possible pour Lara. Ceci n’est pas toujours les cas, et une prise en charge hospitalière s’avère indispensable dans certains cas.

Je précise que dans le cas de l’anorexie de mon fils, j’ai aussi fait le choix de travailler à mi temps, ainsi que de lui dispenser un enseignement à domicile (2 ans) et de répondre au plus près aux adaptations nécessaires pour mieux le soigner. Des épreuves difficiles, mais je suis heureuse aujourd’hui d’avoir pris ces décisions puisqu’elles ont permis une prise en charge plus personnalisée et adaptée.

Pour voir la BANDE ANNONCE du film « la peau sur les os », cliquez ici. (Désolée, je ne suis pas parvenue à la trouver en français)

Les lecteurs de cet article ont aussi apprécié l’article : « les films traitant de l’anorexie et de la boulimie« .



J’espère que vous aurez apprécié cet article qui présente ces deux films quasi homonymes au sujet des troubles des conduites alimentaires.

Bien que réalisés à plus de trente ans d’écart, tous deux montrent très bien la complexité de ces troubles qui affectent les trois dimensions de l’individu atteint : le corps, le psychisme, les émotions.

Les différentes présentations cliniques et symptômes associés y sont bien abordés : mésestime de soi, manque de confiance, dévalorisation ; mais aussi peur de grandir, de devenir femme, de la sexualité ; ou encore hyperactivité, obsessions associées, déformation de l’image du corps et dysmorphophobie.

On regrette juste le fait que les TCA peuvent atteindre aussi les garçons et les hommes soit complètement évincé. Deux films à voir absolument pour mieux appréhender les TCA.

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9 commentaires sur « Deux films presque homonymes à propos des troubles du comportement alimentaires »

  1. Bonjour, impliquée dans les métiers de bouche, les maladies liées à l’alimentation et leur impact dans la vie au quotidien m’interpelle. Bien souvent méconnues voire inconnues elles sont surtout classées « tabou » et l’on imagine facilement le désarroi devant ce type de maladie. Ton témoignage m’a donné envie d’aller visionner ces deux films, essayer de comprendre un peu plus. Merci pour ton article.

  2. Quel bel article! Je suis enseignante, et je n’ai apppris que l’année dernière, suite au cas d’une étudiante confrontrée aux TCA, que ce type de maladie apparait aussi dans des familles unies, « bien sous tous rapports ». Auparavant, je pensais que l’anorexie était liée à une enfance difficile, ou à des dysfonctionnements au sein de la structure familiale… Bref, tout un tas de clichés qui sont véhiculés par manque d’informations…

    1. Oui, en effet les enseignants peuvent éventuellement être bien placés pour donner l’alerte, de même que le personnel de la restauration scolaire qui devrait être un peu plus sensibilisé aux TCA. L’adolescence est vraiment une période sensible et les TCA concernent beaucoup cette tranche d’âge

  3. Bonjour,

    La bande annonce du e est réellement boulversante car en 3 min elle montre ce que c’est de souffrir de cette maladie.
    Dommage que ces films ne soient pas plus montrés pour sensibiliser les personnes et déceler plus tôt les signes d’un enfant qui prend la pente glissante.
    Il n’y a pas plus d’évènement ou de manifestation organisés autour des TCA pour sensibiliser et enseigner ce que c’est ?

    1. Merci beaucoup pour ce commentaire. La sensibilisation commence à devenir plus active, heureusement, mais c’est encore un peu juste à mon sens car les TCA sont en augmentation. Tous les ans, le 2 juin, il y a la journée mondiale des TCA avec des programmes et manifestations un peu partout dans le monde. Ce serait bien que plus de gens connaissent ces troubles afin d’être non jugeants et plus soutenants vis à vis d’un proche qui aurait un TCA et qui est en grande souffrance

  4. Merci pour ce résumé très complet ! Ces documentaires ont l’air de décrire les TCA de manière réaliste, contrairement aux documentaires tv souvent caricaturaux et racoleurs…

    1. Merci Gaelle pour ton commentaire ; en effet, les plus connus sont l’anorexie, la boulimie et l’hyperphagie boulimique. L’orthorexie est en forte augmentation. ET puis il y a tout un tas de TCA dits atypiques, beaucoup moins bien connus et qui occasionnent pourtant bien des souffrances pour les malades.

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