J’ai lu un article très intéressant dans la revue Alternative bien être au sujet des constellations familiales, et qui donnait l’exemple d’application de ce type de thérapie pour une jeune femme de 18 ans souffrant d’anorexie. Il m’a paru important de vous communiquer l’essence du propos dans cet article.
Dans l’absolu, il n’y a pas vraiment de nouveauté dans cette approche, qui peut être mise en œuvre dans le cadre d’une thérapie familiale, toujours indiquée, voire indispensable, lorsque le TCA concerne un enfant, un ado ou un jeune adulte.
Mal-être, relations conflictuelles, difficultés de vie…sont souvent des facteurs retrouvés lors de l’instauration d’un trouble du comportement alimentaire.
Dans certains cas de troubles du comportement alimentaires (TCA), des interactions dysfonctionnelles existent dans la famille. C’est loin d’être le seul facteur entrant dans la genèse d’un TCA, ce pourquoi l’approche pluri-disciplinaire est toujours recommandée.
Ces interactions dysfonctionnelles sont parfois présentes avant la manifestation du trouble alimentaire.
Elles sont souvent présentes une fois le TCA instauré car celui ci perturbe beaucoup les interactions entre les individus de la famille.
L’idée des constellations familiales est d’aider à résoudre ces difficultés d’interactions en les mettant en scène, par des jeux de rôle .
Développées par un ancien missionnaire dans les années 1990 (Bert Hellinger) et par la psychiatre Théa Schönfelder,
proches de la psychogénéalogie, les constellations familiales se proposent de mettre en lumière l’inconscient familial par le biais de jeux de rôle.
L’objectif est d’aider au rétablissement de l’ordre dans le système relationnel de l’individu et lui permettre d’y retrouver
sa place, pouvant ainsi contribuer à la guérison.
Qu’est-ce que la constellation familiale ?
En essence, la constellation familiale est une forme de thérapie familiale systémique.
Cette technique de psychothérapie, apparue au début des années 1960, considère la difficulté psychologique d’un individu comme le symptôme d’un dysfonctionnement de son système relationnel, le plus souvent de sa famille.
C’est une vision assez réductrice, à mon sens, mais l’occulter constitue, une perte de chance dans la prise en charge de la personne malade.
Par la vision systémique du problème, il s’agit d’améliorer le fonctionnement familial.
Les différences de la constellation par rapport à la thérapie systématique sont la brièveté de la thérapie et la mise en scène des absents.
Ces spécificités sont exposées dans une vidéo Youtube dans laquelle Gérard Fossat, l’homme qui a introduit les constellations familiales en France en 1997, retrace une séance vécue par une jeune patiente.
Exemple d’application de constellation familiale chez une jeune femme souffrant d’anorexie mentale
Commentaires de cette séance de constellation familiale utilisée dans cette situation d’anorexie
Description de la séance
Lorsque Caroline a eu 18 ans, sa mère a débuté un régime. Elle a décidé de faire de même, mais un TCA s’est insidieusement installé : l’anorexie mentale.
Le père, qui était souvent absent pour affaires, a réorganisé son travail et délégué des tâches afin d’être plus proche de sa fille.
Lors de la séance, l’accompagnant demande à la jeune fille (elle même représentée dans cette vidéo) de choisir dans le groupe les personnes qui représenteront les membres de sa famille puis de les placer sur la scène, avant de s’y placer elle-même.
La représentante de Caroline désigne deux femmes qu’elle place debout l’une en face de l’autre.
L’une représente son père, l’autre sa mère. Une troisième, à l’écart, représente son frère. Puis elle se place elle-même entre ses « parents ».
L’accompagnant s’approche de la mère et lui demande ce qu’elle ressent à cette place :
— Je ne vois pas mon mari. Je ne vois que ma fille. J’ai le sentiment d’être responsable de ce qui lui est arrivé.
Que ressent le père ?
— Je me sens coupable et responsable de la situation, du fait de mon absence.
Que ressent la fille ?
— Je ressens les parents très proches de moi. C’est inconfortable, un peu étouffant.
Effets de la séance
La personnification a fonctionné en ce sens qu’elle a libéré la parole et permis aux protagonistes d’exprimer leurs sentiments.
Chaque participant semble ainsi ressentir les émotions de son rôle.
L’accompagnant (le thérapeute) s’approche alors de Caroline et lui propose de faire un pas en arrière, laissant ses parents face à face.
Puis il interroge le ressenti de chacun. Les deux parents expriment un léger malaise à la perspective de vivre de nouveau une intimité perdue…
La fille exprime une sensation d’espace et de liberté et le désir d’aller voir son frère, plus âgé et émancipé.
Explications de Gérard Fossat : la fille occupe la place du « patient identifié ».
En thérapie systémique, cela traduit le fait que son symptôme est la manifestation visible d’un malaise familial, ici un problème de couple.
« Quand elle a déclenché sa maladie, cela a forcé son père à revenir, à être présent, explique‑t‑il. Ça a obligé le couple à rester uni et la famille à rester entière.»
Autrement dit, sa maladie « permet » à la cellule familiale de rester intacte, évitant peut-être une rupture.
En proposant à la fille de changer de position physiquement, l’accompagnant a permis de prendre du recul vis à vis du problème de couple de ses parents.
Pour terminer la séance, il suggère à la jeune fille de prononcer une phrase « guérisseuse », permettant de l’aider à exposer sa prise de conscience : « Je prends un peu de distance, j’aimerais m’émanciper. Et je prends le risque que vous n’arriviez pas à résoudre votre problématique de couple. Et je ne veux plus être celle qui vous aide à résoudre votre problématique.
Application plus générale de la thérapie systémique à votre situation
Chaque membre de la famille (et notamment le ou les parents) devrait prendre en compte cette dynamique familiale lorsque l’un des membres souffre d’un TCA.
Et plus généralement, la personne en proie à un TCA doit toujours être replacée dans un système où l’on évalue la qualité des interactions : système familial, système scolaire, environnement de travail pour les adultes…
Ainsi, au sein de la famille, il me semble fondamental de se questionner sur :
– le rôle de chacun au sein de la cellule familiale,
– les émotions ressenties par chacun et surtout le fait de les exprimer,
-le temps passé par chacun au sein de la famille.
Chaque situation est particulière et mérite largement d’être analysée. En effet la thérapie familiale et systémique au sens large a fait ses preuves dans la prise en charge et la résolution de TCA. Le bénéfice d’une thérapie familiale sera très souvent au rendez vous.
Dans ma situation, mon jeune fils de 10 ans a souffert d’anorexie prépubère grave avec un pronostic vital engagé. La thérapie familiale (mais pas particulièrement la « constellation familiale ») a été effectuée en 10 séances et fut très bénéfique surtout dans l’expression des sentiments respectifs et dans la narration de l’histoire familiale.
Les autres adaptations ne sont pas le fruit de la thérapie familiale mais celui de décisions personnelles suite à l’analyse de notre situation :
Si mon fils était assurément prioritaire dans ma vie, j’ai fait en sorte (ainsi que le papa) qu’il redevienne la priorité en matière de temps de présence à ses côtés, en faisant le choix, bien que difficile à mettre en œuvre, de diminuer mon temps de travail jusqu’à résolution complète de son TCA.
Ce temps de travail dégagé a permis de consacrer un temps de présence plus long, de meilleure qualité, ainsi qu’un temps de soins conséquent (soins pluridisciplinaires soutenus) et enfin une période d’enseignement à la maison pendant 2 ans (scolarité à domicile puisqu’il avait subi du harcèlement scolaire). Ces adaptations sont particulières à mon cas, car mon enfant avait seulement 10 ans lorsqu’il est tombé malade. Les adaptations sont, bien entendu, différentes pour un ado, ou encore pour un jeune adulte qui quitte le cocon familial par exemple.
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A mon sens, les familles ont le droit d’avoir des problèmes. Et je pense qu’elles sont aussi, dans bien des cas, et surtout bien accompagnées, une solution importante dans la résolution des TCA.
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Excellent article.
Je ne connaissais pas la constellation familiale mais elle met en évidence des mécaniques intéressantes.
De ce que je comprends, elle permet de prendre conscience de problématiques et/ou traumas familiaux qui desservent, pour mieux les appréhender et permettre aux familles de mieux vivre certaines situations.
Si je comprends, bien le focus est donc quelque peu dévié, ce qui, selon moi, est une approche intéressante dans certains cas 🙂
merci pour le partage.
Oui en effet, merci pour ce commentaire, le jeu de rôles encadré par un thérapeute permet de changer de focus et de voir les choses autrement en se mettant à la place d’un autre membre de la famille. Cela permet aussi parfois de libérer la parole sur les ressentis voire les ressentiments.